Ceni, Confessions religieuses, Consensus et Antidémocrates [Tribune de Crispin KABASELE TSHIMANGA BABANYA KABUDI]

Depuis quelques semaines, l’actualité politique nationale est dominée par les tiraillements autour de la succession de Monsieur Corneille Nangaa à la tête de notre Centrale électorale, la Commission Electorale Nationale Indépendante, CENI. Instituée par la Conférence Nationale Souveraine, CNS, en 1992 et reconduite en 2002 par le Dialogue Inter-Congolais de Sun City (Afrique du Sud), en vue de « dépolitiser » l’organisation des élections jadis l’apanage du Ministère de l’Intérieur, la CENI peine à devenir réellement « apolitique ». Elle est plus politisée que jamais depuis son entrée en fonction.

Tous les oripeaux d’apolitisme de la CENI ne sont que des leurres. La Société Civile congolaise, consciente ou inconsciente, a cédé la présidence de notre centrale électorale aux Confessions religieuses sous un prétexte fallacieux que celles-ci seront « neutres » et indépendantes comme l’église au milieu du village. Les faits démontrent le contraire.

Les délégués des Confessions religieuses à la tête de la CENI se sont tous compromises. Monsieur Apollinaire Malumalu, représentant des Catholiques, avait organisé des élections chaotiques et scandaleuses en 2006. La fraude avait été généralisée. Les Protestants, à leur tour, avec le Pasteur Daniel Ngoyi Mulunda, avaient également fait la honte en 2011. Les plus mauvaises élections jamais organisées. Ce fut une catastrophe nationale.

Quant aux Musulmans, leur silence actuel en dit long. Devant prendre le flambeau après les Protestants, ils avaient marchandé leur tour. Contre quoi ? A vous d’y répondre ! Ce sont eux qui avaient fait la passe en or aux Catholiques qui, sans se gêner, avaient recouru de nouveau à Apollinaire Malumalu. A la suite de son décès, paix à son âme, il fut remplacé par le phénoménal Corneille Nangaa. Celui-ci fut boudé par les mêmes Catholiques dont les soutanes supposées immaculées sont plus souillées que jamais.

Le chaotique épisode lié à la succession du Président Corneille Nangaa nous fait découvrir les réalités jusque-là cachées. Les Confessions religieuses ne sont pas réellement apolitiques. Elles font de la politique. Elles respectent difficilement leurs engagements. La violation du gentleman agreement qui prévoit que chaque Confession religieuse occupe, à tour de rôle, la présidence de la CENI selon le plan qu’elles avaient, elles-mêmes, établi. Après les Catholiques, deux fois, les Protestants, une fois, et étant entendu que les Musulmans avaient déjà cédé leur tour aux Catholiques, il appartient maintenant aux Kimbanguistes de diriger à travers leur candidat, Monsieur Denis Kadima Kazadi, lequel candidat a obtenu la confiance de six Confessions religieuses sur huit. Pourquoi les Catholiques et les Protestants sollicitent-ils l’arbitrage du Président de la République qui doit être tenu à l’écart selon la procédure arrêtée par la Société Civile pour la désignation du Président de la CENI ? Est-ce pour le compromettre ?

Que dire du consensus tant réclamé par les Catholiques et les Protestants ? Est-il besoin de souligner que le consensus n’a jamais été démocratique ? Dans notre pays, le mot « consensus » est souvent brandi par les ennemis de la démocratie. Il sert de motif de blocage de toute décision qui ne plait pas à telle ou telle autre partie. Dans le cas de la plateforme des Confessions religieuses, l’article 18 de la Charte de cette plateforme tranche : en cas d’absence de consensus, place au vote.

Par des manœuvres dolosives, les Catholiques et les Protestants, mauvais perdants, font tout pour bloquer la décision de la majorité des Confessions religieuses. Ce n’est pas démocratique !

Selon de nombreux cas vécus dans notre pays, on recourt toujours au vote. On appelle ça le consensus démocratique quand le consensus intégral, donc l’unanimité, fait défaut.

A titre d’exemple. En 2003, par manque de consensus pour la désignation du Vice-Président de la République venant de la Composante « Opposition Politique », il avait été procédé au vote. C’est ainsi que Monsieur Arthur Z’AHIDI NGOMA avait été choisi contre le Président de l’UDPS absent, Dr Etienne Tshisekedi wa Mulumba d’heureuse mémoire. Malgré la protestation de l’UDPS, le candidat soutenu par le pouvoir de l’époque, Monsieur Arthur Z’AHIDI NGOMA, fut investi Vice-Président de la République.

En 2016, s’agissant du remplacement de l’Abbé Apollinaire Malumalu, l’Eglise Catholique n’avait pas appuyé la candidature de Monsieur Corneille Nangaa. Comme celui-ci avait le soutien des sept autres Confessions religieuses, il fut installé comme Président de la CENI.

Cette fois-ci, c’est le tour de l’Eglise Kimbanguiste qui a présenté Monsieur Denis Kadima Kazadi. Ce dernier a recueilli six voix contre deux. Pourquoi refusera-t-on d’appliquer la jurisprudence Z’AHIDI NGOMA et Corneille Nangaa ? C’est la grande question !

La grande leçon est celle d’affirmer haut et fort que le consensus n’a jamais été démocratique. Il est antinomique de la démocratie. C’est une astuce pour s’opposer à une décision démocratiquement prise. Car, la démocratie se fonde sur le vote qui départage les antagonistes, qui permet de désigner la majorité d’un côté et la minorité de l’autre. Dans le cas de la CENI, les Catholiques et les Protestants s’affichent clairement comme les antidémocrates. C’est mon point de vue.

Crispin KABASELE TSHIMANGA BABANYA KABUDI
Président National de l’UDS
Coordonnateur National du Groupe des Partis Indépendants (GPI)

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